Le droit au repos et les congés payés à Monaco

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Alors qu'en juin 2022, nous avions traité le sujet du « droit au repos » européen et de ses possibles incidences sur le droit monégasque...
Monaco Employment and HR
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Alors qu'en juin 2022, nous avions traité le sujet du « droit au repos » européen et de ses possibles incidences sur le droit monégasque, les évolutions jurisprudentielles récentes – et législatives – sur « le droit au repos » en France viennent confirmer que cette notion fait désormais partie des éléments à prendre en compte par les employeurs, y compris monégasques, dans le cadre du droit à congés payés.

En effet, bien que le législateur monégasque n'ait pas encore légiféré sur cette notion, le Tribunal du travail a récemment reconnu l'existence d'un droit annuel au repos, à la détente et aux loisirs, en s'inspirant de la jurisprudence européenne développée par la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE).

A Monaco, seules certaines périodes d'absence sont assimilées à du temps de travail effectif et ouvrent droit à des congés payés. C'est le cas par exemple des suspensions du contrat de travail pour congé maternité ou accident du travail. A l'inverse, les arrêts de travail n'ayant pas de caractère professionnel ne permettent pas aux salariés d'acquérir des droits à congés payés – en tout cas, à Monaco, et pour l'instant.

Allant beaucoup plus loin, et se fondant notamment sur la charte des droits fondamentaux, la CJUE estime que les États membres doivent garantir une durée de congés payés de 4 semaines, peu importe que le salarié ait été absent sur la période de référence, et peu importe le motif de l'absence.

C'est précisément sur ce point que le régime monégasque pourrait être amené à évoluer, compte tenu du chemin pris par la France à ce sujet, au visa de texte très similaires aux dispositions légales monégasques.

Aux termes de plusieurs décisions du 13 septembre 2023, la Cour de cassation française est venue considérer que les dispositions du code du travail français, parce qu'elles subordonnent le droit à congés payés à l'exécution d'un travail effectif, sont contraires au droit de l'Union Européenne – justifiant d'écarter l'application des articles du code du travail non-conformes à la notion européenne de droit au repos.

Conséquence pratique immédiate : le salarié français en arrêt de travail pour une cause non professionnelle peut, depuis ces décisions, prétendre à ses droits à congés payés au titre de sa période d'arrêt – le Gouvernement français a d'ailleurs annoncé qu'il légifèrerait sur le sujet – ce qui est désormais chose faite –, afin d'apporter davantage de sécurité juridique aux employeurs, notamment s'agissant de la période sur laquelle un rappel de congés payés peut être effectué.

La récente décision du Conseil constitutionnel français du 8 février 2024, qui a confirmé la conformité à la constitution des articles du code du travail sur l'acquisition du droit à congés payés uniquement pendant le temps de travail effectif, n'a pas de conséquence pratique sur la jurisprudence dégagée à l'automne par la Cour de Cassation, puisque c'est en vertu des normes supérieures européennes, et non de la Constitution française, que le régime français d'acquisition du droit à congés payés a été écarté par les juges.

Dans tous les cas, la France a, depuis le 24 avril 2024, fait évoluer ses dispositions légales, aux fins notamment de (i) prendre en compte les périodes d'arrêt de travail (qu'ils soient professionnels ou non-professionnels, et peu importe leur durée) dans l'acquisition des congés payés ; (ii) prévoir une période de report de 15 mois pour le salarié qui n'a pas pu poser, pour cause de maladie ou accident, les congés payés qu'il a acquis.

Si ces dispositions et décisions françaises ne sont évidemment pas transposables à Monaco – eu égard à la souveraineté de la Principauté, laquelle n'est en outre pas membre de l'Union Européenne -, la résurgence de ce sujet peut amener les juges monégasques, qui ont déjà consacré la notion de « droit au repos » à porter une attention particulière au respect de ce droit vis-à-vis des salariés, notamment en situation d'absence prolongée.

Il ne peut donc être exclu que, de manière prétorienne, l'émergence de ce droit fondamental se concrétise par la création d'une obligation jurisprudentielle, pour les employeurs, de garantir une période minimale de congés même lorsque l'absence d'un salarié n'est pas légalement assimilée à du temps de travail effectif.

Cela pourrait avoir des conséquences pratiques importantes pour les employeurs monégasques, qui pourraient alors être condamnés à payer des dommages et intérêts aux salariés en situation d'absence prolongée qui n'aurait pas bénéficiés d'une période de repos minimale.

L'indemnité compensatrice de congés payés ne devrait en revanche pas être concernée par cette évolution de régime, la consécration du droit au repos étant distincte du droit à voir monétiser ses congés payés non-pris.

En attendant des précisions légales ou jurisprudentielles sur la notion du droit au repos, et surtout sur ses conséquences concrètes quant à l'acquisition du droit à congés payés, les employeurs avisés ne manqueront pas de faire preuve de prudence en situation d'absence prolongée de l'un de leur salarié, afin de traiter la question du droit annuel au repos au cas par cas et éviter ainsi une condamnation à des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

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