L'annonce des mesures portant sur la réforme de notre régime fiscal afin que Maurice soit désormais conforme aux normes de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l'Union européenne fut certainement l'un des points saillants de ce Budget 2018- 2019, surtout pour ceux qui évoluent au sein du global business. Mais le bon Dieu est dans le détail, dit-on...

Une mesure dite «administrative» pourrait avoir des implications importantes sur les droits des contribuables.

Jusqu'à présent, la loi prévoyait que si un contribuable souhaitait contester un redressement fiscal de la Mauritius Revenue Authority (MRA) auprès du département Objections, Appeals & Dispute Resolutions (OADR) de la MRA, il devrait payer un montant égal à 10 % du montant du redressement. Au cas où le contribuable ne serait pas satisfait avec la détermination de l'OADR, il avait la possibilité de demander que l'Assessment Review Committee (ARC) entende son cas. Dorénavant, la loi prévoit que le contribuable paie 5 % additionnels s'il souhaite avoir recours à l'ARC. Il est indéniable que cette mesure restreindra davantage l'accès du contribuable à la justice.

Le Premier ministre, répondant à une question du député Shakeel Mohamed lors des débats parlementaires du 5 décembre dernier, affirmait que durant la période 1er juillet 2015 au 30 juin 2016, la majorité des cas référés à l'OADR fut maintenue par celle-ci. Durant cette même période, les contribuables concernés ont eu recours à l'ARC dans 545 sur 956 des cas maintenus.

Sachant qu'avoir recours à l'ARC nécessite souvent l'intervention d'un avocat ou d'un conseillerfiscal : le coût de cette intervention peut être un élémentdissuasif pour le contribuable. Devoir dorénavant payer 5 % additionnels pèsera lourd dans la balance et il n'est pas déraisonnable d'en conclure que le nombre de recours à l'ARC sera affecté.

«Nous voulons restreindreles contestations frivoles et l'abus du système par le contribuable», me répondrat- on sûrement du côté de la MRA. Or, il existe déjà des garde-fous adéquats pour limiter de telles contestations. Outre les 10 % qui doivent être payés à présent, depuis l'année dernière, le contribuable doit aussi soumettre un statement of case appuyé des documents justificatifs et de witness statements au moment où il soumet sa demande auprès de l'ARC.

La préparation de ces documents est souvent longue et permet, dans une large mesure, de faire le tri et d'identifier ces cas qui sont peu défendables. De plus, l'Income Tax Act et la VAT Act contiennent des provisions qui permettent à la MRA de déterminer qu'une objection soit considérée expirée si le contribuable ne fournit pas les informations demandées par l'OADR.

Mais encore, me dira-ton, «l'ARC a la discrétion de statuer que le contribuable n'a pas à verser ce prépaiement». Hélas la jurisprudence n'apas, dans le passé, été très généreuse envers le contribuable dans l'application de cette discrétion. L'ARC a, à maintes reprises, déterminé que des difficultés financières ne suffiraient pas, à elles seules, de justifier le nonpaiement de ce «dépôt».

Il est aussi utile de rappeler que la Cour suprême (Dahari & Ors v Director General, MRA & Ors (2009) SCJ 206) a précédemment déterminé que ce système de pré-paiement – à l'époque de 30 % ! – n'était pas anticonstitutionnel.

Mais qu'en est-il des droits des contribuables ? Où sont les garde-fous pour prévenir contre les redressements frivoles ? Pourquoi est-ce que la protection est à sens unique ?

Une législation permettant éventuellement au contribuable de récupérer ses coûts légaux s'il obtient gain de cause à l'ARC aiderait peut-être à redresser une balance déjà peu équilibrée.

Originally published in lexpress.mu

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.